Enseignement de la lecture: le ministre serait avisé de saisir la chance qui lui est offerte !
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Madame, Monsieur,
Comme prévu, s’agissant de la mise en œuvre de la réforme sur l’apprentissage de la lecture voulue par Monsieur de Robien, la rentrée scolaire est marquée par une grande confusion.
Les parents constatent que, dans les classes de CP, les pédagogies proposées sont, comme les années précédentes, dans 90% des cas, des méthodes mixtes (appelées aussi semi-globales ou intégratives) telles gafi, ratus, mika, ribambelle, abracadalire…etc….et beaucoup parmi eux manifestent de différentes manières leur mécontentement devant le fait que les annonces du ministre ne sont pas suivies d’effets.
En dépit de ce constat, le ministre, quant à lui, s’exprime beaucoup dans les medias et dans différentes enceintes (comme le Parlement ou le Collège de France) et il continue en toute occasion à expliquer que le problème est, selon lui, réglé par son arrêté du 24 mars 2006 modifiant les programmes et confirmant son orientation vers la méthode « syllabique ». Il va même jusqu’à menacer de sanctions ceux qui ne respectent pas ses directives !
Cette situation est préoccupante d’autant que de nombreuses personnalités ou organisations, au sein même de son ministère, dénoncent ce discours démenti par les textes. En voici quelques exemples :
- le 12 octobre : « lettre ouverte au ministre signée par 12 organisations » (1) (syndicats, associations de parents et de pédagogues) ;
- le 14 octobre : « Appel à la grève du zèle » (1) de l’un des 5 chercheurs choisis par le ministre pour prendre la parole à son séminaire du 9 mars ;
- le 19 octobre : « lettre du syndicat SIEN-UNSA » (1) à la suite d’une menace de sanction de l’un des siens, inspecteur du département du nord.
En outre, depuis quelques jours, on peut consulter sur le site de Monsieur Franck Ramus (2), un « texte cosigné par 22 chercheurs » (1) qui affirme « Il n'y a pas lieu d'imposer une unique méthode d'enseignement de la lecture ». Monsieur Ramus avait déjà publié en février dernier, sur son site personnel, puis dans « le monde de l’éducation » de mars une première contribution titrée: « Un point de vue scientifique sur l’enseignement de la lecture » qu’il avait cosigné avec 17 de ses collègues. Le texte d’octobre est dans la continuité de celui de mars mais on peut relever deux faits notables dans la liste de ses signataires:
Le ministre avait sélectionné 5 personnalités pour venir présenter le point de vue des chercheurs lors de son séminaire sur la lecture du 9 mars destiné à l’encadrement pédagogique de son ministère (inspecteurs généraux, recteurs et inspecteurs d’académie). Sur ces 5 personnes, 4 sont parmi les signataires !
On remarque également la présence d’un membre éminent du monde pédagogique qui ne s’était pas joint à l’initiative de mars (2). Cette personnalité (3) vient de publier aux éditions Retz, début septembre, le livre « apprendre à lire à l’école » dans lequel il fait une explication de texte tout à fait pertinente de l’arrêté ministériel de mars dernier……laquelle lui a valu une sanction !
Paradoxalement, cette dernière initiative, parce qu’elle met en évidence un consensus entre chercheurs et pédagogues, offre à Monsieur de Robien une belle occasion de faire un pas important dans la bonne direction. Il peut en effet acter formellement, sans l’imposer, la liberté de choisir une méthode alphabétique pour ceux des maîtres qui le souhaitent, ce que leur interdisent juridiquement l’arrêté du 24 mars 2006 et les programmes 2006-2007actuels.
C’est pour l’encourager à saisir cette chance que je me suis permise de lui adresser le 30 octobre une « lettre ouverte » (1).
Très cordialement
G Wettstein-Badour le mercredi 1er novembre 2006
(1) voir documents joints
(2) http://www.ehess.fr/centres/lscp/persons/ramus/ ou rechercher sur Google avec Frank Ramus comme mot clef
(3) Monsieur Roland Goigoux, professeur des universités à l’IUFM d’Auvergne