AVIS D’EXPERT - Pour les enfants souffrant d’hyperactivité avec déficit de l’attention, tout doit toujours aller très vite. Bruno Falissard, pédopsychiatre et membre de l’Académie nationale de médecine, nous éclaire sur ce trouble qui interroge notre société.

Depuis plusieurs années, l’hyperactivité avec déficit de l’attention (TDAH) interroge notre société. Du point de vue clinique, ce trouble associe classiquement impulsivité, hyperactivité motrice et déficit de l’attention. On constate que les garçons sont plus touchés que les filles, mais il est difficile de dire avec précision combien d’enfants ou d’adolescents sont concernés car tout dépend du seuil d’intensité que l’on considère comme pathologique. Les études trouvent le plus souvent que 5 % des garçons en âge d’être à l’école primaire seraient atteints ; c’est sans doute une estimation excessive.
Bruno Falissard, pédopsychiatre. Membre de l’Académie nationale de médecine. Pédopsychiatre. Membre de l’Académie nationale de médecine
Dans tous les cas, le TDAH est fréquemment associé à de nombreux autres troubles (énurésie, opposition et provocation, mais aussi anxiété, dépression et plus tard addictions). Du fait même de sa formulation, le TDAH est un trouble très surprenant: depuis quand un enfant plein de vie et d’énergie relèverait-il de la médecine et de la psychiatrie en particulier? Dans quel monde vivons-nous, si l’on doit invoquer le soin et peut-être même les médicaments pour simplement élever nos enfants?
Dans certains États d’Amérique du Nord, plus de 10 % des garçons de 10 ans prennent quotidiennement un médicament stimulant, proche structurellement d’une amphétamine, pour «soigner» leur hyperactivité. En France, on en est encore loin, mais les niveaux de prescription de la fameuse Ritaline augmentent régulièrement. Il est donc nécessaire de s’interroger: quelle validité clinique et scientifique pour ce diagnostic de TDAH? Quels traitements efficaces et quand faut-il traiter? Et, surtout, qu’en pensent les patients eux-mêmes?
Selon les manuels de psychiatrie pour enfants et adolescents, ce trouble aurait été décrit pour la première fois à la charnière du XIXe et du XXe siècle. On parlait alors «impulsivité maladive» ou de «déficit du contrôle moral». Il serait dû à l’addition d’une somme de facteurs, dont certains génétiques et d’autres environnementaux, comme, par exemple, la   prématurité ou le tabagisme pendant la  grossesse. En ce qui concerne le mécanisme biologique de la maladie, il impliquerait des struc-tures cérébrales dopaminergiques, en lien avec une ou plusieurs anomalies du développementdu cerveau : on parle ainsi de trouble neuro-développemental, mais cette dénomination est sujette à discussion. (...)

Auteur de l'article original: Bruno Falissard
Source: Le Figaro.fr
Date de publication (dans la source mentionnée): Dimanche, 4. Juin 2017
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