Encore moins nombreuses, les fumeuses ont plus de risque de développer la maladie que leurs homologues masculins.

Les hommes et les femmes ne sont pas égaux face au cancer du poumon. C’est en tout cas ce que suggère une étude publiée fin mai dans le New England Journal of Medicine . Selon les chercheurs américains, le nombre de nouveaux cas du cancer du poumon a diminué chez les hommes et les femmes âgés de 30 à 54 ans, au cours des 20 dernières années. Mais cette baisse, liée sans conteste à la diminution du tabagisme, a été beaucoup plus abrupte chez les hommes.

«Les femmes vont inhaler plus de toxiques que les hommes pour obtenir le niveau de nicotine dont elles ont besoin»

Résultat, chez les femmes caucasiennes et hispaniques nées à partir du milieu des années 1960, l’incidence du cancer du poumon dépasse désormais celle des hommes. Pourtant, si la proportion de fumeuses a largement augmenté dans la population, elle n’a jamais dépassé celle des fumeurs. «De plus, le nombre moyen de cigarettes fumées par jour continue d’être moins élevé chez les femmes», notent les auteurs de l’étude. La quantité de cigarettes fumées ne semble cependant pas un bon critère pour comparer les risques liés au tabagisme. «Lorsqu’on fait les tests de dépendance, comme celui de Fagerström, les femmes ont le même niveau de dépendance que les hommes pour une quantité de cigarettes fumées inférieure. Cela signifie qu’elles vont inhaler plus de toxiques que les hommes pour obtenir le niveau de nicotine dont elles ont besoin», explique le docteur Ivan Berlin, pharmacologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris et secrétaire général de la Société française de tabacologie.

Une différence qui pourrait s’expliquer notamment par le statut hormonal des femmes. En effet, le taux d’œstroprogestatif augmente le métabolisme de la nicotine. Chez les femmes en âge de procréer, la nicotine s’élimine plus vite. Cet effet des œstrogènes a été parfaitement démontré, chez les femmes enceintes, dans une étude publiée fin 2017 dans Journal of Studies on Alcohol and Drugs. Les femmes enceintes fumaient moins de cigarettes que le groupe témoin mais avaient un taux de cotinine dans la salive (un marqueur du taux de nicotine) tout aussi élevé.

Cette inhalation plus intense pourrait expliquer une autre particularité du cancer du poumon chez les femmes: leur localisation. «Ce sont des cancers qui se trouvent souvent plus loin dans les poumons. Moins proches de la trachée que chez les hommes», explique le Pr Julien Mazières, pneumo-oncologue au CHU de Toulouse. Pour le spécialiste, le cancer du poumon de la femme possède sans conteste des spécificités. «Outre leur localisation, ce sont des tumeurs différentes histologiquement (par l’étude de la structure microscopique des tissus, NDLR) (...)

Auteur de l'article original: Anne Prigent
Source: Le Figaro Santé
Date de publication (dans la source mentionnée): Samedi, 16. Juin 2018
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