Des chercheurs allemands ont caractérisé deux stades de schizophrénie bien distincts correspondant à des différences neuro-anatomiques visibles à l'IRM.

PSYCHIATRIE. Ne dites plus la schizophrénie, mais les schizophrénies. C'est la tendance forte de ces dernières années en psychiatrie qui tend à montrer que cette maladie mentale est bien plus un ensemble de troubles psychotiques qu'une entité isolée. Un nouvel élément à cette conception plus fidèle à l'hétérogénéité de "la maladie" vient d'être apporté par une équipe de la Ludwig-Maximilian University à Munich (Allemagne). Les chercheurs en psychiatrie ont en effet identifié des différences neuro-anatomiques dans le cerveau correspondant à deux stades bien distincts de schizophrénie. Chez quelque 600 000 personnes en France, les troubles psychotiques associés se manifestent à des degrés divers par des expériences hallucinatoires éprouvantes, des pensées confuses et idées délirantes.

Le machine learning à l'aide de la psychiatrie
Dans ces travaux publiés par la revue Schizophrenia Bulletin, l'équipe allemande a opté pour une stratégie originale. "Ils ont utilisé un modèle de machine learning [apprentissage machine] qui apprend à un logiciel à reconnaître des formes pathologiques, explique le Dr Guillaume Fond, médecin psychiatre et chercheur à la faculté de médecine Aix-Marseille et au Centre d'étude et de recherche sur les services de santé et la qualité de vie. On indique au programme que telle image cérébrale correspond à de la schizophrénie et il apprend ainsi à partir d’échantillons de patients très bien caractérisés. Puis il s'agit de répliquer l'expérience dans un grand échantillon, en l’occurrence plus de 300 patients, et on lui demande enfin de classer les gens entre schizophrénie et sujets sains. Cette méthode permet de montrer que le modèle est valide. On peut alors demander à la machine, à l’intérieur d'un groupe d'images cérébrales de schizophrénie, de distinguer des sous-groupes statistiquement significatifs."

En mélangeant des données cliniques classiques (âge du début de la maladie, âge, sexe, niveau d’étude, etc.) avec des données d’imagerie (volumes des différentes aires cérébrales, ils ont ainsi établi deux groupes associés à la durée de la maladie.

"Il ne s'agit pas de deux types, mais de stades de la maladie associés à la durée d'affection chez chaque patient. Ça entre dans la logique d'un classement en différents stades comme on le fait pour le cancer par exemple", précise le chercheur. Surtout, l'équipe allemande montre qu'on "peut prédire ces stades vu à l’imagerie par une dizaine de questions cliniques. Il y a donc une cohérence clinique dans ces deux stades visibles au niveau neuro-anatomique", explique Guillaume Fond. (...)

Auteur de l'article original: Hugo Jalinière
Source: Sciences et Avenir
Date de publication (dans la source mentionnée): Samedi, 24. Mars 2018
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