Lorsque la schizophrénie, la dépression ou l’anorexie mentale entre dans la fratrie, celle-ci a besoin de soutien et d’information.

«C’est elle qui peu à peu disparaît, mais c’est vous qui cessez d’exister»: le psychologue Samuel Dock exprimait sur son blog, il y a quelques semaines, la souffrance générée par le trouble psychique dans la fratrie - ici l’anorexie mentale de sa sœur. «C’est dans ce paradoxe douloureux que nous absorbe l’anorexique: la quête du rien prend la place de tout, le vide la place de vous. (…). Vos réussites et vos échecs, vos moments de bonheur comme vos plus secrètes angoisses, votre vie qui continue, maintenant grise et mutique, plus rien n’importe lorsqu’une personne de votre entourage souffre de la pathologie psychiatrique la plus létale de toutes.»

Pascal-Henri Keller, professeur émérite de psychologie clinique à l’université de Poitiers et psychanalyste, s’exprime de manière analogue concernant la souffrance qui, sous le nom de «dépression», a amené son frère cadet à se tuer. «Je crois que son suicide a rendu mon frère omniprésent dans ma vie», confie celui qui a notamment publié une Lettre ouverte au déprimé (Éd. Dunod). «Ma carrière professionnelle, la manière dont ce drame familial a teinté ma clinique, mon expérience de la souffrance psychique, ma connaissance des effets secondaires, des antidépresseurs… Par maints aspects, j’ai parfois l’impression de revisiter avec certains patients ce que j’ai vécu avec mon cadet.»

Une formation pour les aider à connaître la maladie
Ces témoignages sont des signes des temps: alors que jusque-là les parents de malades étaient les premiers à s’exprimer et à être aidés, notamment via des associations comme l’Unafam (Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées), l’attention semble se porter aujourd’hui sur la fratrie.

Ainsi, le réseau ProFamille*, qui «dispense une approche cognitivo-comportementale visant à amener progressivement le patient atteint de schizophrénie et sa famille à passer d’un sentiment d’impuissance et d’une position de passivité ou de révolte à une position de collaboration active à travers une vision réaliste de la maladie», vient-il de lancer une formation spécifique à usage des frères et sœurs de malades… Un premier «groupe test» a réuni 16 frères et sœurs en région parisienne lors d’un week-end d’octobre dernier. (...)

Auteur de l'article original: Pascale Senk
Source: Le Figaro.fr
Date de publication (dans la source mentionnée): Dimanche, 11. Mars 2018
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