Il doit être généralisé en octobre et contiendra tous les éléments concernant votre santé. Mais les médecins qui l’expérimentent depuis un an le jugent encore peu convaincant. Et les patients doutent de son utilité.
Le Dr Yannick Schmitt revient d’une tournée de visites à domicile et s’apprête à recevoir sans rendez-vous dans son cabinet de Lingolsheim (Bas-Rhin). Dans cette banlieue de Strasbourg située en bout de ligne de tramway, son cabinet est à la croisée de cités populaires et d’une zone pavillonnaire. Comme tous ses confrères généralistes du Bas-Rhin, il expérimente depuis janvier 2017 le futur DMP, le « dossier médical partagé », qu’il doit aussi promouvoir auprès de ses patients.

Un projet qui remonte à 2004
Un document virtuel personnel contenant toutes les informations sur la santé du patient et que le ministère veut généraliser à partir d’octobre prochain. Lancé en 2004, relancé en 2016 après avoir coûté 500 M€ sans jamais prendre son envol, ce projet est-il cette fois abouti ? Médecins et patients se le sont-ils approprié ? Pas sûr.

Yannick Schmitt suit environ 900 patients, « dont beaucoup d’enfants », insiste-il, mais seule une cinquantaine disposent à ce jour d’un DMP. « Ça ne passionne pas les foules », sourit le généraliste plutôt progressiste. Surtout, « sur ces cinquante dossiers, aucun n’a encore été alimenté par les hôpitaux alors que certains patients y ont séjourné pendant l’expérimentation. Si tout le monde ne joue pas le jeu, ça ne sert à rien », résume le médecin alsacien qui préside par ailleurs RéAgir, un syndicat de jeunes médecins.

Peu pratique à l’usage
Mais la diffusion de ce carnet de santé digital rencontre d’autres freins. « Les professionnels de santé tels que les biologistes ne savent pas si le patient venu pour une analyse dispose d’un DMP, du coup ils n’y transfèrent pas leur rapport », détaille le généraliste. Sans parler du temps nécessaire pour créer un dossier ou y accéder.

« Pour ça, explique-t-il, je dois passer par mon logiciel métier. Premier problème, il ne me reconnaît pas par défaut alors que je suis le médecin traitant du patient ; à chaque fois je dois m’identifier, regrette le praticien. Ensuite, ce logiciel est peu ergonomique, je dois faire plusieurs manipulations pour créer ou ouvrir un DMP, ce qui nécessite 3 à 5 minutes à chaque fois. C’est trop ».

Et puis à l’usage, le DMP manque de souplesse : « Impossible de hiérarchiser les dossiers qui s’y trouvent ou de les renommer pour faciliter leur classement ». Peut mieux faire, donc, côté médecins.

Les patients n’en voient pas toujours l’utilité... (...)

Auteur de l'article original: Daniel Rosenweg
Source: Le Parisien
Date de publication (dans la source mentionnée): Vendredi, 8. Juin 2018
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