Témoignage d'une neuropsychologue filmée dans le reportage -un monde sans fous-
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France5 a diffusé le mardi 13 avril un reportage intitulé "Un monde sans fous". Ce documentaire "arpente les lieux où échoue la folie pour y interroger ceux qui la vivent et ceux qui y sont confrontés. De l'enfermement aux soins au long cours, il évalue chaque réponse sur fond de réforme gouvernementale de la psychiatrie publique".
Nous sommes nombreux à dénoncer la réforme gouvernementale qui tend à instaurer une logique d'entreprise partout où cela est possible, à mesurer les dégâts qui en découlent dans la prise en charge de nos patients. Dans ce contexte, qui pourrait revenir sur l'intérêt d'un tel documentaire ? Et pourtant... une fois encore le manichéisme a pris le pas sur le travail journalistique afin de nous servir une réflexion tronquée de toute la complexité du sujet afin de n'en garder qu'une idée centrale : il y a le "bien" et le "mal", les "humanistes" et les "anti humanistes", les "psychanalystes" et les "autres".
Le témoignage de notre collègue rend bien compte du procédé utilisé pour réaliser ce documentaire et je m'associe à sa démarche pour dénoncer la situation. Les ficelles sont grosses mais je ne me fais aucun doute sur le pouvoir des images utilisées. Neuropsychologie, neurosciences et comportementalisme sont mis dans le même panier, celui de l'Amérique et de la réforme gouvernementale de la santé. Qu'importe si la neuropsychologue insiste sur la dimension du Sujet. Ce n'est pas ce qu'on souhaite montrer, les propos seront donc coupés au montage pour mieux associer les images entre elles : d'un coté un ordinateur, une salle peu avenante, des tests et de l'autre des gens souriants dans un jardin, en train de récolter des groseilles... il fait beau.. le soleil tape et l'interne en psychiatrie est même de la partie dans ce combat contre les "anti".
C'est d'autant plus regrettable que sur le fond, nombreux sont les collègues qui partagent cette crainte d'un avenir comptable et rationnalisé. Malheureusement, le clivage et l'opposition entre une bonne et une mauvaise pratique annule l'intérêt du documentaire pour ne laisser qu'un goût amer comme le souligne Ewa dans son témoignage... Un grand merci à elle pour avoir pris la parole après la diffusion du "documentaire".
