Plus de 18 000 patients, dans 44 pays ! RE-LY, la plus grande étude jamais conduite chez des patients souffrant de fibrillation auriculaire -le trouble cardiaque le plus fréquent- a tenu ses promesses. Présentés au Congrès de la Société européenne de Cardiologie qui se termine aujourd’hui à Barcelone, ses résultats mettent en évidence les bienfaits d’un anticoagulant oral de nouvelle génération -le dabigatran- sur le risque d’accident vasculaire cérébral (AVC). De quoi changer la vie de millions de patients à travers le monde. Explications.

Le dabigatran est le chef de file d’une toute nouvelle famille d’anticoagulants : les inhibiteurs directs de la thrombine. Cette substance joue un rôle central dans le processus de formation des caillots sanguins. Au cours de ce travail, ses vertus ont été comparées à celles d’un traitement de référence par antivitamine K (AVK), la warfarine en l’occurrence.

Les AVK ? Voilà sans doute la classe de médicaments que les patients comme les médecins exècrent le plus. Et pour cause ! Leur efficacité varie selon les personnes. Pire, chez un même malade, elle dépend de multiples facteurs : co-existence de pathologies, prise d’autres médicaments et même l’alimentation. Ainsi le brocoli, les épinards, la laitue voire le café diminuent-ils l’efficacité des AVK.

Résultat, pour s’assurer que la dose n’est ni trop forte, ni trop faible, chaque patient doit réaliser des bilans biologiques -des INR- très régulièrement. Au moins une fois par mois. Avant, le cas échéant, de réajuster le tir avec son médecin. Il n’en reste pas moins que les AVK seraient responsables à eux seuls de 12,3% des hospitalisations pour accident thérapeutique, en France.

Moins de saignements

« C’est vrai, cela fait de nombreuses années que nous donnons des AVK », explique le Pr Jean-Yves Le Heuzey, chef du service cardiologie de l’Hôpital européen Georges Pompidou (Paris) et investigateur principal de cette étude en France. « Ils sont certes efficaces mais leur maniement est très compliqué. Le but était de trouver un traitement aussi efficace et plus maniable ». C’est semble-t-il chose faite.

Les résultats de RE-LY (18 113 patients âgés en moyenne de 72 ans et suivis pendant deux ans) font état « d’une réduction significative du nombre d’AVC avec un taux de saignement inférieur, y compris les saignements engageant le pronostic vital et les hémorragies intracrâniennes », poursuit le Pr Stuart Connolly (Hamilton-Canada), l’un des co-auteurs. « Ils vont au-delà de nos espérances. Nous avons maintenant un traitement par voie orale qui offre une protection supérieure contre les AVC avec moins de saignements et sans avoir besoin de contrôles réguliers ».

Et le Pr Le Heuzey d’enchaîner : « cela va changer la vie de nos patients souffrant de fibrillation auriculaire. Ils n’auront plus d’INR à faire ». Encore un peu de patience toutefois. Il devrait se dérouler quelques mois avant que ce traitement, (utilisé depuis peu en France pour la prévention de la formation de caillots sanguins chez les patients ayant eu une chirurgie pour prothèse de hanche ou de genou) bénéficie de l’indication requise. L’enjeu est de taille : chaque année dans le monde, 3 millions de personnes sont victimes d’un AVC lié à la fibrillation auriculaire. La moitié meurt dans l’année…
Source : De notre envoyé spécial au Congrès de l’European Society of Cardiology (ESC), Barcelone, 29 août-2 septembre 2009 – New England Journal of Medicine ;361, published online 30 august 2009. Etude RE-LY (pour Randomized Evaluation of Long-term Anticoagulant therapY.

Date de publication (dans la source mentionnée): Lundi, 7. Septembre 2009