« C'est clair », « en mode », « bref », « voilà »... Les tics de langage squattent nos conversations, ponctuent nos phrases, et l’air de rien, révèlent de nous ce qu’on aimerait parfois cacher.

Il suffit de s’écouter parler deux petites minutes pour constater l’ampleur du phénomène : de petits mots béquilles, souvent vides de sens, sortent de notre bouche sans même que l’on s’en rende compte. Une sorte de « fièvre ticoïde », comme la nomme le spécialiste de la langue Pierre Merle*, s’est emparée de nous ! « Cette pratique a toujours existé, précise l’expert. Il y a des tics éternels (les « heu » et les « ohlala » que les Anglais aiment nous entendre dire) et d’autres qui ne durent qu’une saison. Mais avec la prolifération des médias et des moyens de communication, elle atteint des sommets ». Leur interprétation n’est pourtant pas univoque. Pour le psychanalyste Saverio Tomasella**, deux formes de tics au moins se distinguent : « ceux que l’on s’approprie par mimétisme, conscient ou non, d’abord dans la sphère familiale, puis à l’école, dans le milieu professionnel et dans l’environnement social, note-t-il. Puis ceux, plus subjectifs et personnels, qui sont le signe d’une préoccupation profonde, d’un conflit intérieur, ou tout simplement, l’expression d’un trait de caractère marquant. »

* Auteur de « Panorama aussi raisonné que possible de nos tics de langage », éd. Fetjaine

** Auteur de « L’inconscient, qui suis-je sur l’autre scène ? », éd. Eyrolles

Un manque d’assurance

C’est plus fort que nous : au terme de chaque phrase, on interroge notre interlocuteur d’un « tu vois ? », « tu comprends ? » ou du fameux « tu vois ce que veux dire ? ». « Cela peut signifier que l’on a conscience de tenir des propos confus, manquant de clarté, remarque Béatrice Toulon*, coach et formatrice en média-training. Le problème est que bien souvent ces mots ne sont pas de vraies questions, et n’appellent donc pas une vraie réponse. Leur récurrence traduit plutôt une pensée automatique, qui ferme la porte à un dialogue authentique ». Autres manies langagières typiques des personnalités peu assurées : les « entre guillemets » et autre « je dis ça je dis rien », qui annulent une affirmation et donnent le sentiment que l’on n’est pas convaincu soi-même par ce que l’on avance…

Je m’en débarrasse ou pas? « Mettez-vous au défi de remplacer votre « tu vois ? » par un « qu’est-ce que tu en penses ? », qui vous inscrira dans un véritable échange, suggère Béatrice Toulon.  (...)

Auteur de l'article original: Emilie Gilmer
Source: Femme Actuelle
Date de publication (dans la source mentionnée): Dimanche, 14. Juin 2015
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